Scooters

SORTEZ 
LES MASQUES A GAZ

Emission du 5 septembre 2000

    
Le succès des scooters est fulgurant, en 5 ans, leur nombre a triplé. Il est vrai que ces engins combinent de nombreux avantages : moins chers qu'une deuxième voiture, peu gourmands, faciles à parquer et à manier. On leur prêterait volontiers en plus des vertus écologiques, mais on aurait tort.
Résultats de l'étude

A l'Office fédéral de l'environnement, Roger Evéquoz est le chef de la division de la protection de l'air, section trafic. Il est chargé de suivre l'évolution de la pollution de l'air liée au trafic routier et explique qu'"en gramme de polluant par kilomètre parcouru, c'est vrai qu'actuellement les motos ont des émissions nettement plus élevées que les voitures équipées d'un pot catalytique. Et, dans la mesure où les voitures s'améliorent toujours davantage, la différence augmente en conséquence. Pour les motos, et en particulier celles équipées d'un moteur deux temps, on a des émissions nettement plus élevées, jusqu'à 100 fois plus d'hydrocarbure par kilomètre parcouru."
C'est le Laboratoire fédéral d'essais des matériaux (EMPA) qui a comparé les gaz d'échappement émis par différents motocylces avec ceux d'une voiture équipée d'un catalyseur. Les motos avaient été empruntées à des personnes privées et n'avaient subi aucun réglage particulier. Cette étude démontre qu'un scooter de 125 cm3, équipé d'un moteur deux temps, pollue autant que 144 voitures. Pour une moto de 1200 cm3 sans catalyseur, on arrive à 200 voitures.
Au-delà des chiffres, il faut savoir qu'en Suisse les voitures parcourent chaque année trente fois plus de kilomètres que les motos. Sur l'ensemble du trafic, l'automobile demeure donc, pour l'instant, le plus grand facteur de pollution. René Evéquoz confirme qu'"en terme d'émissions au niveau national, on peut dire que les motos représentent environ 10 à 15% des émissions des voitures de tourisme, mais que leur part au kilomètre parcouru n'est que de 2 ou 3%." Même si ces statistiques peuvent paraître modestes, il n'empêche qu'en terme de pollution de l'air, parcourir un kilomètre en scooter équivaut à rouler une centaine de kilomètres en voiture.

Pourquoi tu tousses
En matière de conséquences sur la santé, le trafic routier est responsable de 50% de la pollution de l'air. On estime à 3'300 le nombre de décès précoces imputables chaque année à la mauvaise qualité de l'air que nous respirons, sans parler des cas d'asthme, de bronchites, etc.
Mais le pire est probablement derrière nous. Depuis 1950, le trafic routier a progressé chaque année avec une régularité inébranlable. Parallèlement, les émanations polluantes ont pris l'ascenseur. En 1979, la première norme anti-pollution entre en vigueur et marque un fléchissement de la courbe. En 1987, la Suisse est le premier pays européen à introduire le catalyseur automobile. Cette introduction a permis une nette amélioration de la situation en matière de pollution de l'air. Le chef de la division protection de l'air ajoute que "le catalyseur réduit environ de 90 à 95% les émissions. La mesure est donc tout à fait efficace. Mais il faut évidemment garder à l'esprit que le catalyseur est inefficace en matière de pollution par le dioxyde de carbone, qui n'est pas un gaz toxique pour l'homme, mais qui est un gaz à effet de serre." Mis à part le CO2, la pollution liée au trafic automobile est pratiquement redescendue au niveau de ce qu'elle était dans les années 50.

La Suisse suivra l'Europe

 Comme les mesures prises ont manifestement fait leurs preuves, on envisage sérieusement aujourd'hui de les étendre aux deux-roues. La technologie est prête, le catalyseur moto existe, et certains constructeurs ont déjà commencé à en équiper leurs modèles. La marque Honda par exemple, a lancé cet été un scooter doté d'un catalyseur proche de ceux qui équipent les voitures. BMW a aussi annoncé qu'à l'avenir tous ses nouveaux modèles en seront aussi dotés.
Au-delà de l'argument marketing, ces catalyseurs ne sont malheureusement pas toujours aussi efficaces que ceux qui équipent les automobiles. Selon René Evéquoz, "le problème réside peut-être dans le fait qu'il n'y a pas, au niveau de la législation, d'exigences en matière de durabilité. Les catalyseurs fonctionnent bien à l'état neuf, mais assez rapidement, l'efficacité du catalyseur diminue." Au fil des kilomètres, les catalyseurs ont tendance à s'encrasser et à se dérégler. Pourtant, contrairement aux voitures, la loi n'impose aucun contrôle antipollution aux motos. La législation actuelle ne demande un respect des émissions que  jusqu'à 50km/h, ce qui fait qu'en pratique, à des vitesses plus élevées, le catalyseur n'est pas garanti.
Le Parlement européen de Strasbourg doit prochainement voter une proposition allemande, qui, si elle est acceptée, imposera aux constructeurs d'équiper tous les deux-roues de catalyseurs. Le règlement entrera en vigueur en 2003, et en 2005 tous ces catalyseurs devront répondre à des normes très strictes du point de vue de l'efficacité et de la durée de vie.
De son côté, la Suisse ne sera pas pionnière, elle attendra les Européens.
Si d'ici là vous avez un peu honte de polluer autant qu'une centaine de voitures, vous pouvez toujours faire régler correctement l'allumage et la carburation de votre scooter, c'est toujours ça de gagné pour nos poumons !

  
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